LE DEFI DE LA CONFORMITE LBC/FT DES BARREAUX FRANCOPHONES ET LUSOPHONES DE LA CEDEAO ET DE LA MAURITANIE

Réunis à Dakar, les Bâtonniers s’emparent du sujet

Les bâtonniers francophones et lusophones réunis à Dakar, le 3  février 2022

Depuis le premier Forum régional sur la conformité LBC/FT des Barreaux des États membres du GIABA qui s’était tenu les 10-12 février 2020, OCWAR-M accompagne les barreaux des pays lusophones et francophones partenaires du projet. 

En effet, en raison des flux financiers qui transitent par les cabinets des avocats, cette profession peut être particulièrement exposée au risque de blanchiment de capitaux ou de financement du terrorisme et en devenir un vecteur contre son gré, en sa qualité d’« EPNFD » (entreprises et professions non financières désignées).

Il est essentiel que, dans le respect de l’autorégulation de la profession, des dispositifs soient mis en place afin que l’avocat puisse rester le garant des droits fondamentaux du citoyen par son indépendance et dans le respect du secret professionnel, tout en contribuant à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme. 

Les exigences de la lutte contre le blanchiment s’imposent à tous les professionnels et les cellules de renseignement financier doivent pouvoir compter sur une participation active des barreaux dans cette lutte. 

Pour atténuer les risques auxquels la profession d’avocat est ainsi exposée, certaines mesures ont donc été identifiées avec le consultant régional recruté par le projet, Sylvain Sankalé, dans le cadre de travaux menés avec les bâtonniers des onze pays francophones et lusophones de droit continental dans lesquels OCWARM intervient : le Bénin, le Burkina Faso, le Cap Vert, la Côte d’Ivoire, la Guinée, la Guinée Bissau, le Mali, la Mauritanie, le Niger, le Sénégal et le Togo. 

Le second Forum régional sur la conformité LBC/FT des Barreaux organisé conjointement par le GIABA, OCWARM et la GIZ qui s’est tenu le 12 octobre 2021, a dressé le diagnostic des atouts et des failles dans la conformité des Barreaux de la région et a posé les jalons des premières mesures à mettre en œuvre dans le cadre d’un programme d’appui auprès des pays partenaires. 

Dans la droite ligne de ce second Forum régional, OCWARM a réuni à Dakar le 3 février 2022 les Bâtonniers francophones et lusophones d’Afrique de l’Ouest, ainsi que leurs Dauphins. Sous l’égide du GIABA et de l’Union européenne, les travaux ont été animés par le consultant régional et les experts de la CIB, de l’UICA, de l’UNCA et de la PPLAAF.  

La Conférence Internationale des Barreaux

Créée en 1985, la Conférence Internationale des Barreaux (CIB) réunit des barreaux libres et indépendants partageant une tradition juridique commune pour défendre leur indépendance et aider à l’harmonie et au respect des règles de l’exercice professionnel et de la déontologie de la profession d’avocat. Elle regroupe les Barreaux qui ont le droit civil en partage, qui affirment un idéal d’indépendance et dont les organes directeurs sont démocratiquement désignés par les avocats eux-mêmes. 

Dans le respect de l’autonomie des Barreaux, la CIB est aux côtés de ses membres dans l’action qu’ils mettent en oeuvre en vue de développer un Etat de Droit dans chacun de leur pays. Elle entend également mettre en œuvre la notion du caractère universel des Droits de l’Homme et en particulier, les Droits de la Défense.

Pour en savoir plus : site de la CIB 

Les Bâtonniers et dauphins ont échangé sur les exigences de conformité en matière de LBC/FT et sur leur rôle dans la mise en œuvre de ces exigences ; ils ont souligné l’importance des CARPA nationales, et la nécessité d’en évaluer l’efficacité actuelle et les difficultés, en vue de leur amélioration. 

La CARPA

La CARPA (Caisse des règlements pécuniaires des avocats) est une institution créée par la profession d’avocat, placée sous la responsabilité et l’autorité des Ordres. Elle a été rendue obligatoire dans de nombreux pays. Le rôle de la CARPA est de comptabiliser les règlements reçus par les avocats pour le compte de leurs clients à l’exclusion des honoraires et des remboursements de frais, en déchargeant l’avocat de la gestion comptable des règlements correspondants. La CARPA n’est pas un établissement financier. En comptabilisant les règlements pécuniaires, elle assure la garantie de la représentation des fonds et elle contribue au devoir de vigilance de l’avocat,

Les règlements reçus des clients ou pour leur compte sont déposés au compte bancaire de la CARPA. Dans la comptabilité de la CARPA, chaque avocat ou cabinet d’avocats dispose d’un compte et chaque affaire donne lieu à l’ouverture d’un sous compte spécifique.

Grâce à la CARPA, il n’y a pas de risque de confusion entre la comptabilité du cabinet de l’avocat et la comptabilité des fonds reçus de tiers. La CARPA contribue ainsi de façon déterminante à la garantie de représentation des fonds. En outre, aux côtés de l’avocat, la CARPA contribue à l’obligation de vigilance en s’assurant de la conformité des règlements pécuniaires, de la provenance des fonds et de leur destination. Dans le cadre des obligations LBC/FT auxquelles les avocats sont assujettis, la CARPA, par la régulation exercée et la mutualisation des moyens de contrôle, offre à la profession d’avocat une assistance indispensable en préservant le secret professionnel.

La CARPA contribue ainsi à la protection de l’ordre public économique dans le respect des droits fondamentaux. Pour en savoir plus : site de la CARPA 

L’UNCA

L’Union nationale des CARPA (UNCA) a été créée en 1975 afin de lier les différentes CARPA de France. Au fil du temps, l’UNCA est devenue un outil garant de l’indépendance de la profession et de sa pérennité. 

Pour en savoir plus : site de l’UNCA

L’UICA

L’Union internationale des CARPA a été créée en 2013 afin de développer la coopération des Caisses de règlement pécuniaires des avocats (CARPA) dans le monde.

Il ressort de cet atelier que les préoccupations des différents Barreaux en matière de LBC/FT sont sensiblement les mêmes et incitent à la nécessaire sensibilisation et formation des avocats. Les échanges ont également témoigné de la nécessité de renforcer les ordres des avocats, notamment par la rédaction de textes adaptés, et du besoin d’assistance pour l’opérationnalisation des CARPA nationales existantes ou en création. 

Ces ateliers ont permis de consolider les plans d’action nationaux que les Barreaux vont s’attacher à mettre en œuvre en 2022-2023.

Première formation nationale pour le Barreau du Sénégal en février 2022

Les avocats du barreau du Sénégal accompagnés des bâtonniers francophones et lusophones à Dakar, le 4 février 2022

Le 4 février 2022, le Barreau du Sénégal a été le premier de la région à bénéficier de cette formation qui a vocation à voyager au sein de l’espace CEDEAO et en Mauritanie. Les avocats ont ainsi suivi la sensibilisation aux risques de BC/FT et aux enjeux propres à leur profession, sous l’égide de leur Bâtonnier, Maître Papa Laïty NDIAYE, et de son dauphin Maître Mamadou SECK.

Cette première édition a permis de mettre le curseur sur les préoccupations des avocats : la compatibilité de la conformité aux obligations LBC/FT avec le secret professionnel, la difficulté de faire une déclaration de soupçon sans preuve (les avocats ne sont pas des enquêteurs de la police), les problèmes de sécurité pour l’avocat que peut poser l’émission de déclarations de soupçons, la pertinence de passer par le Bâtonnier qui jouerait un rôle de filtre, la question délicate du risque de corruption de certains avocats, ou encore le rôle essentiel de la CARPA dans un tel dispositif.

Plus généralement dans leur rôle de gardiens du droit et de la LBC/FT, les avocats présents ont également été sensibilisés au rôle majeur  des acteurs particuliers issus de la société civile que sont les lanceurs d’alerte dans la lutte contre les crimes financiers : ils sont à la source de révélations qui permettent de démontrer les « pactes secrets » de corruption et infractions assimilées. Les formateurs de la Plateforme de Protection des Lanceurs d’Alerte en Afrique (PPLAAF), avec laquelle OCWAR-M a lié un partenariat pour cette activité, ont ainsi présenté  le rôle du lanceur d’alerte et ont sensibilisé les avocats sur la nécessaire protection juridique de ces acteurs en Afrique de l’Ouest. (Pour en savoir plus, visionnez notre spot de présentation). Les débats ont révélé les préoccupations de l’assistance concernant les risques pris par l’avocat défenseur du lanceur d’alerte quand ce dernier révèle une information qui peut s’avérer fausse ou non établie judiciairement, la question de la base légale sur laquelle l’avocat peut s’appuyer pour protéger son client lanceur d’alerte, ou encore l’instrumentalisation possible de l’avocat par le lanceur d’alerte qui poursuivrait alors des objectifs non affichés. Tous ces enjeux doivent être pris en compte dans la protection juridique nécessaire des lanceurs d’alerte en Afrique de l’Ouest, acteurs importants de la LBC/FT.

La Plateforme de Protection des Lanceurs d’Alerte en Afrique

La Plateforme de Protection des Lanceurs d’Alerte en Afrique (PPLAAF) a pour objectif de défendre les lanceurs d’alerte, de mener des actions de plaidoyer et d’engager des litiges stratégiques en leur nom lorsque leurs révélations traitent de l’intérêt général des citoyens africains. La PPLAAF propose différents services aux lanceurs d’alerte afin d’assurer leur protection et la diffusion de leurs révélations : la mise à disposition de moyens de communication sécurisés, l’assistance juridique ainsi que l’assistance médiatique. De plus, la PPLAAF mène des actions de plaidoyer pour l’adoption par les autorités africaines de lois progressistes de protection des lanceurs d’alerte. Ces dernières années, elle a également contribué à de nombreuses révélations de scandales financiers en Afrique, particulièrement sur des faits liés à la République Démocratique du Congo et à l’Afrique du Sud. Avec l’ouverture récente de la Maison de l’Alerte à Dakar, la PPLAAF souhaite accroître ses actions en Afrique de l’Ouest pour favoriser l’émergence de lanceurs d’alertes dans la région. 

Pour en savoir plus : site de la PPLAAF

OCWAR-M met en œuvre une activité en partenariat avec la PPLAAF, dans le cadre de laquelle les avocats bénéficieront de formations. Plus d’infos dans la rubrique « L’actu d’OCWAR-M » !

INTÉRÊT IMMÉDIAT DU BARREAU MAURITANIEN POUR CETTE FORMATION

Les membres du Conseil de l’Ordre des avocats à Nouakchott le 22 mars 2022

A la demande du Bâtonnier de MauritanieMaître Brahim Ould Ebety, très engagé sur ces questions, la formation s’est tenue les 22 et 23 mars 2022 à Nouakchott. Les dix membres du Conseil de l’Ordre des avocats et vingt-cinq avocats membres du barreau ont ainsi suivi la même formation que leurs confrères sénégalais.

 

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